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En réalité, c'est assez compliqué, parce que j’utilise alternativement l'un, l'autre et ai pris l’habitude de mélanger des deux. Je vais donc vous expliquer ces choix, mais préfère vous prévenir : voulant simplifier mon annonce pour la rendre accessible à tous, j’ai volontairement passé sous silence cette épineuse question, qui tend à diviser la communauté de joueurs du MdT sur des questions de fond. Ne soyez donc pas découragés par l’explication à suivre, elle s’adresse à quelques vieux briscards, qui attendent de savoir s’ils doivent me lyncher ou m’incorporer à leurs rangs. Or, j’ai suffisamment d'expérience pour dire que chaque édition a sa pierre à ajouter à l'édifice, et suis ouvert aux amateurs de l’édition classique comme de la nouvelle mouture, me mettant dans la position inconfortable consistant à tenter de réconcilier les deux, au risque de me mettre à dos les uns comme les autres.
Aussi, disons qu'en règle générale, je préfère le Requiem à la Mascarade, tout simplement parce qu'il m'y est plus facile de faire passer au second plan les intrigues politiques, par rapport à mes enquêtes ; cette dimension est toujours bien présente, mes joueurs peuvent en témoigner (à tel point que le scénario entier peut souvent être bouclé par l'usage exclusif de la diplomatie, quoi que ceci nécessite une certaine maestria et un peu de chance), mais j'évite à tout prix de m'appesantir sur la complexité que la société vampirique peut atteindre, lorsque toute la Camarilla est concernée par la moindre variation dans le fragile status quo qui en maintient la cohésion.
De cette manière, j'évite au maximum de m'embourber, moi et mes joueurs, dans les luttes de pouvoir entres les Primogènes de chaque clan, où chacun cherche à prendre l'ascendant et devenir Prince (schématiquement, hein, je cherche à dégager des tendances générales, pas à simplifier à outrance la Mascarade). Ceci, à mon avis, nuit à la cohésion même du groupe, ralentit le rythme de jeu et oblige presque les joueurs à tenir un carnet de bord de sa propre partie, afin de se souvenir du nom, du rang, du clan et de l'alignement des quelques 20 PNJs récurrents au sein d'une telle cour ; cet investissement, j'y ai rechigné en tant que joueur, je ne l'imposerait à personne.
Mes coteries en sont plus unies (même si d'expérience, la trahison est monnaie courante, en raison des dilemmes moraux que j'intègre à chacun de mes scénarios), la masse d'infos sur l'univers à absorber d'entrée de jeu en est considérablement réduite, ce qui facilite l'intégration de débutants, et j'y trouve, de mon point de vue, un intérêt renouvelé à jouer des nouveaux nés, en limitant leur frustration … et la mienne.
Je m'explique : ce jeu porte en germe, dans ses règles mêmes, un profond élitisme qui, conjugué aux traditions ultra-conservatrices des Anciens, condamne les jeunes vampires à une certaine impuissance, et la scène politique sur laquelle ils évoluent à l'immobilisme. Partant de là, les joueurs sont frustrés de ne pouvoir rien faire d'autre, socialement, qu'obéir à un PNJ plus puissant qu'eux (puisqu'ils ne peuvent pas peser autrement qu'en étant les instruments du MJ lui-même, ce qui nuit à leur libre arbitre), et je suis frustré de les voir ignorer ma préparation de scénario par leur défaitisme.
Évidemment, donner moins d’importance à la politique ne fait que diminuer cette tendance, mais j’ai constaté qu’un joueur motivé et déterminé à jouer dans la cour des grands aura toujours accès à suffisamment de complexité et de challenge pour ne pas tomber dans l’excès inverse.
Par exemple, prenons ma gestion de la fonction de Prince : plutôt qu’en faire un despote subtil entouré de courtisans aux prestiges directement proportionnel à leur génération, ce qui ne laisserait que bien peu de chance à mes pauvres Ancillæ de s’adresser seulement à lui (tant leurs intermédiaires seraient nombreux et d’intérêts divergents aux leurs), j’ai instauré un système politique hybride, à mi-chemin entre les intérêts de l’Invictus et les Cartiens de la nouvelle édition. Aussi, bien que ce rôle reste occupé par le célèbre François Villon, omniprésent dans les Paris by Night de bien des MJs, j’ai travaillé à en faire une figure plus légitime, plus accessible, en faisant de Villon le successeur habile et mesuré d’un tyran Toréador, ayant aussi bien impulsé à Versailles son prestige que provoqué une sanglante guerre civile, la Révolution.
Becoming superhuman, is becoming inhuman.
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A l’inverse, en ce qui concerne Mage, ma préférence ira à l’Ascension, en inconditionnel partisan des luttes entre Traditions et Technocratie que je suis. Pour avoir survolé le background de l’Éveil, aussi perché que fumeux, je lui préfère la résistance résolue et désespérée d’idéalistes anonymes, contre la force monolithique de l’ancien Ordre de la Raison. En revanche, dans mes parties, cet univers étendu se verra considérablement simplifié … Et pour cause : cet extraordinairement riche contenu, je le maintiens comme vestige d’une période antérieure, tout en assombrissant considérablement le jeu dans son ensemble.
Afin de vous faire une idée, imaginez que l’écart entre Technocrates et Mages se creuse au même rythme que la Technologie évolue dans notre société, et considérez que le rapport de force entre ces deux camps s’est déséquilibré au-delà de toute proportion : Traditions aux rangs décousus, dispersées aux quatre vents, véritable purge ayant mené à la disparition de presque tous les Maîtres, chasses à l’homme organisées à grand renfort de contingents entiers d’Hommes en Noir à chaque tentative contre les Conventions, fermeture des accès à une majorité des Royaumes de l’Umbra …
Par exemple, dans la campagne que j’ai fait jouer, tous les personnages étaient des Orphelins (ce statut étant devenu la norme, depuis que les Traditions ne sont plus que l’ombre d’elles-mêmes), je ne crois pas avoir seulement évoqué devant eux le Conseil des Neufs, et le mage le plus puissant de leur entourage était " seulement " Adepte de deux sphères.
Là encore, ces choix assez singuliers trouvent leurs racines dans ma volonté de rendre accessible aux débutants les enjeux, parfois colossaux, des scénarios les impliquant, ainsi qu’en leur permettant de découvrir le background au fur et à mesure de la campagne. Dans un univers aussi basé sur le secret, et aussi étendu que Mage, je trouvais en effet dommage de perdre mes effets de surprise tout en assommant tout ma table avec une cosmologie si étendue ; ça, et ma décision de faire du rang de Maître le dernier accessible, tant les Archisphères ne me semblent utiles qu’à titre d’inspiration pour le MJ. Et puis, rassurez-vous : étant donné ma vision de ce qu’est l’Ascension, ce ne sont pas les challenges qui vont manquer … Ce n’est pas pour rien que ma version de Mage ne s’intitule pas " l’Ascension " mais " la Chute ".
What rises must fall. What has fallen may rise again.
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De là, en ce qui concerne le Monde des Ténèbres, vu par un " simple " humain, j’irais jusqu’à dire que la différence entre les deux éditions importe si peu, qu’elle en devient négligeable. A quoi bon savoir si la chose immonde que l’on essaye d’abattre est un Malkavian de l’ancienne ou de la nouvelle version de cet univers, quand l’on est trop occupé à choisir qui tenir en joue, face à deux exemplaires de votre fiancée ? Pourquoi définir que l’Esprit qui hante votre maison s’abreuve à un Node, plutôt que regagner des points d’Essence en vous tourmentant, alors qu’il est manifestement en train de drainer la vitalité de tout ce qui vit en ces lieux, et que vous vieillissez si vite que le temps tout entier semble s’accélérer autour de vous ? Vous le remarquerez bien assez tôt, mais l’ignorance dans laquelle vos personnages seront très souvent, la perte de repères que vous éprouverez devant l’horreur, et même la nature de ce qui vous assaillira, ne requiert pas de différentier les deux systèmes.
Le seul point de réelle contradiction dans ma vision des choses, c’est que ces deux univers sont difficilement miscibles ; un exemple typique serait de déterminer ce qu’est l’Umbra, et comment la gérer, alors que les Onirologues en ont une version radicalement différente de celle dans laquelle les Loups Garous des Déchus identifient et traquent les Vampires du Requiem. J’ai résolu cet écueil en évitant, sauf circonstances exceptionnelles, de faire interagir les différentes facettes de cet univers. Autrement dit, ne vous attendez pas, ou du moins pas de suite, et sans un réel effort de préparation de ma part, à jouer des parties mixtes, où vos Nouveaux Nés côtoieraient l’Initié de votre meilleur ami, dans une lutte épique contre je ne sais quel Nephandus cherchant à invoquer Cthulhu. Et ce, même si j’envisage pleinement la badassitude d’un tel scénario, puisque j’ai pris le parti de maintenir l’intégrité du MdT, ce qui implique de maintenir immergée la majorité de l’iceberg. A ce titre, et devant la démultiplication des scénarios visant à réunir les trois opus du MdT auquel j’assiste, je tiens à rappeler que la proportion d’êtres surnaturels doit rester infinitésimale pour qu’une supercherie pareille soit viable, donc cohérente, ce qui rend le rapprochement d’êtres aussi exceptionnels que deux d’entre eux aussi improbable qu’une rencontre du troisième type. Du moins, telle en est ma manière d’envisager cet univers.
Each Shadow conceals only more Shadows.
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Enfin, et ce afin de faciliter la prise d’habitudes au sein de mes tables, quel que soit la facette du MdT qui y est présentée, j’ai choisi de n’utiliser qu’un seul des deux systèmes de règles, sur lequel j’ai greffé tous mes scénarios et personnages ; or, inutile de le nier, j'ai adopté celui de la nouvelle mouture.
Pourquoi ? Parce que c'est lui que j'ai tant parcouru que je le connais par cœur, parce qu'il me parait plus clair, plus simple, et parce l'équilibre entre les compétences m'y parait meilleur. J'ai parfaitement conscience que ce choix est subjectif, mais je ne pense pas qu'appliquer mes malus aux groupements de dés ne soit significativement plus difficile que comparer une difficulté à vos scores. La question est plutôt : préférez-vous, vous, un jeu plus fluide, mieux équilibré par la gestion que j’en ferais, ou me forcer à réapprendre ces réflexes, aux dépends de votre expérience de jeu ?
J’ai toutefois remanié ce système pour le rendre plus réaliste, notamment en adaptant la catégorie de dégâts (contondants, létaux et aggravés) au type de blessures infligées (à la grande surprise d’un collègue MJ, s’exposant en tant que vampire au feu à canon touchant d’un fusil à pompe posé sur sa tempe, mais qui ne s’attendait pas du tout à tomber en Torpeur instantanément, alors que son cerveau retapissait le mur derrière lui, puisque les Semblables ne prennent que du contondant face aux armes à feu), en modifiant le principe des Vices / Vertus, sur lequel je plussoie aux critiques des partisans de la version classique …
Je travaille également sur l’adaptation du système de Magye de l’Ascension à la nouvelle mouture, qui dans l’attente reste inchangé (dix Sphères … franchement, pour quoi faire ?), donc ne vous inquiétez pas, j’essaye de reste ouvert aux propositions et d’établir la meilleure mécanique de jeu possible.
En bref, je dirais que mon Monde des Ténèbres est à celui d’autres MJs ce que l’Appel de Cthulhu est à In Nomine Satanis / Magna Veritas : un jeu au système, au background et aux intrigues très différentes, desquels aucun des deux ne saurait remplacer l’autre, tant leurs apports et leurs visées sont éloignées. Certes, vous trouverez chez moi moins de demi-dieux quasi-immortels, moins de combats épiques, moins d’intrigues internationales et moins de PNJs ex Machina, mais y seront présents plus de mystères, de liberté d’action, de réalisme et de tragédies.
Tout cela pour te répondre, Charles, que cela importe effectivement de savoir quel Monde des Ténèbres je masterise, mais que j’essaye de me situer au-delà de l’opposition entre nouveau et ancien.
Encore désolé de mes explications fleuves, je ne cherche pas lancer un débat, juste à permettre à tous de savoir à quoi s’attendre quand à mes parties ; si vous avez la moindre question à ce sujet, n’hésitez pas à me contacter directement par MP. Encore merci à tous ceux qui auront pris le temps, et la peine, de me lire !
C-H
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Je ne suis pas un Mage, seulement un Dormeur qui Rêve d’Éveil.
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