Chapitre Tierce : Le Pacte
Les lits étaient bien douillets et la nuit qui suivit les plongea dans un sommeil bon et différent de ceux qu’ils avaient passés à bord du navire chancelant. Ils avaient enfin les réponses à leurs questions et pouvaient dormir sans trop se prendre la tête.
Mais la tranquillité ne dura pas si longtemps… En plein milieu de la nuit, ils furent réveillés par des bruits de pas et des chuchotements discrets dans le couloir. Puis, un brin de lumière apparut sous le pas de la porte. Le tavernier était sortit de sa chambre, une lampe à la main et découvrit la source de ce boucan. S’ensuit ensuite un hoquet apeuré lorsqu’il dévisagea les étrangers : « Que… Que faites-vous là ? » Celui qui semblait parler au nom de tous les autres lui cria alors puis un bruit claquant suivit du son du corps grassouillet de l’autre tombant sur le sol se firent entendre. « Tais-toi ! C’est moi qui pose les questions ! » « É… épargnez-moi, je vous en conjure… » « La ferme j’ai dit ! » Une succession de bruits mats prévint que ce dernier ruait de coups le pauvre aubergiste. « Où sont-ils ? » « Qui cela ? » La peur se sent dans la voix de l’aubergiste et il éclate en sanglot. L’autre lui répond dans un langage incompréhensible puis les cris de l’aubergiste s’évanouissent tandis qu’ils l’entendent se faire traîner au sol. « Non, non… Je vous en prie ! Je vous en prie ! » Sa voix est vite étouffée par le son horrible de lames déchirant la chair et de giclures de sang. Une ombre surgit alors sous l’embrasure de la porte. Puis ils entendent un raclement sinistre sur le bois de la porte, ensuite, la poignée frémit sous la force et l’insistance d’une main pressée. Mais les héros s’étaient barricadés dans leur chambre avec le seul mobilier qui était à leur disposition, ils en avaient aussi profité pour fermer le verrou à double tour et y avait laissé la clé. Mais ceci n’empêcha en rien les projets de l’étranger. Il y eut tout d’abord un cliquetis dans la serrure et la clé tomba par terre, ce qui leur valut un petit rire moqueur de l’autre côté de la porte. Ensuite, la porte vola en éclat et un homme, vêtu à la manière des vagabonds, fit irruption dans la chambre. Puis il pointa sur eux un doigt crochu, gouttant d’un liquide épais. « Vous ! Vous venez avec nous, de gré ou de force ! » La réponse du gnome fut vive et il lui envoya sa fameuse tarte à la crème en plein visage. L’autre se dégagea la crème du visage d’une main en étouffant un rire mesquin. La réaction adverse fut plus rapide encore. Le chef cria un ordre et la cloison grossière s’écroula sous le poids d’un autre vagabond qui, dans le même mouvement griffa Sinaton au visage. Et tandis qu’il l’immobilisait, face contre terre, l’un de ses compagnons se rua sur Dylinrae, la prenant par surprise. Le mur de l‘une des pièces voisines fut percé pareille sorte afin de permettre à un quatrième vagabond de se jeter sur Glingal qui était à portée. Le chef, lui, se contenta de contrôler Gimble et Aerdalis sans le moindre mal, les étranglant chacun d’une main. Quant à Argaz, il venait d’invoquer un cylindre protecteur tout autour de sa propre personne, se disant qu’ainsi il ne craignait aucune agression. Son esprit l’avait trompé et, à son grand étonnement, une main crochue défonça le plancher à ses pieds et l’attira vers l’étage plus bas. Mais son gabarit imposant fit qu’il resta coincé dans le plancher : le ventre et la barbe au niveau du sol et les pieds se débattant dans le vide sous lui. Peu d’instant après, ils se retrouvèrent à l’entrée de l’auberge, « escortés » par les hommes aux habits de mendiants. Le nain avait emporté une bonne partie du plafond après que deux vagabonds l’eurent tirés vers le bas et le tiraient derrière maintenant, le moine était tenu en respect par un autre qui l’agrippant au crâne et y enfonçait ses griffes… Ils furent ainsi emmenés, sans sympathie ni clémence, dans des petites ruelles glauques et sortirent de la ville par ce qui semblait être un chemin secret. [Ils épient les toitures et le ciel sur le chemin] Ils se retrouvent en pleine campagne puis traversent un bois sinistre, vieux et sombre. Les rayons du clair de lune et le pétillement des étoiles peinent à percer la voûte feuillue incroyablement dense. [Les arbres sont comme morts : immobiles et menaçants ; le sol est jonché de feuilles mortes ou en décomposition craquant sous leurs pas ; ils ne discernent aucune présence animale dans les parages, ni aucun signe propre] La forêt en elle-même semble abandonnée à son propre sort : sans eau, sans vie !
Ainsi « escortés », ils atteignirent rapidement un champ de pierres, semblaient-elles tombales ou ancestrales, parsemé d’arbres et recouvert de basses herbes et de terre retournée. À leur entrée dans cette « clairière » (on la nommera ainsi), deux autres personnages sortirent de l’ombre et les encadrèrent, chacun d’un côté, dans un élan menaçant. Ils étaient recouverts du même accoutrement, mais celui-ci est teinté d’un rouge sombre. Leurs ongles crochus étaient découverts et leurs yeux luisaient d’un rouge intense. Leur allure était voûtée, arc-boutée : comme sur le qui-vive ! Le « chef » de la petite troupe se détacha du lot et vint s’agenouiller près d’une haute pierre, droit devant eux. Une voix grave et emprunte d’une once de noblesse retentit alors : « Encore toi… Que me veux-tu Gaâsz ? [Prononciation : Gaâsch] L’autre se releva et tira sa révérence en baissant la tête, la main gauche sur la gorge, la droite délaissée dans un arc parfait le long du corps. Il força sa voix et articula avec respect : « Je vous ai amené les visiteurs Seigneur… » Gaâsz s’éloigna de la pierre et une ombre se dessina dans l’obscurité devant lui, la pierre semblait se muer d’elle-même et se révéla n’être en vérité que le premier orateur. La silhouette, moins rustre que toutes les autres était recouverte d’étoffes écarlates de la tête aux pieds ; ses habits étaient très soignés et d’aspect noble, décoré avec habilité par des reliures de fils dorés et bruns. Son manteau était d’un style sans pareil : disposé en quatre morceaux ressemblant vaguement à de longues et larges écharpes, flottants au dessus du sol. Un capuchon vermeil était rabattu sur son visage et un foulard de pareille palette recouvrait sa bouche et son cou ; le tout délivrait une impressionnante paire d’yeux luisants d’intelligence. Sa démarche était lente et noble et ses pas assurés.
Les vagabonds qui les accompagnaient le saluèrent dans la précédente révérence, sans toutefois relâcher leur garde vigilante sur leurs « prises ». Le Seigneur s’arrêta à quelques pas d’eux avec la même assurance, sans craindre le moindre mal de leur part. Il les dévisagea un à un, patiemment, puis il ajouta, de sa voix toujours aussi grave en ouvrant les bras : « Vous avez enfreints une règle majeure de cette nation. La sanction équitable est la mort mais vous, vous n’aspirerez pas à la peine encourue, Visiteurs. Originaires des Libres Terres que vous êtes, vous devriez prendre conscience des risques qu’il vous revient d’affronter et des lois existantes sur SES terres. Ainsi, vous ne serez punis comme nos bons citoyens… si toutefois, vous vous inclinez à nous rejoindre. » Sur ces dernières paroles, il reçut un regard contrarié de la part de Gaâsz. Comme s’il s’y attendait, son maître lui en renvoya un encore plus signifiant. « Va-t-en ! » « Mais… Mon Seigneur… » « Va-t-en j’ai dis ! » L’ordre fut pressant et les yeux des deux sentinelles s’étaient posés sur le regroupement des hommes de Gaâsz. Ce dernier inclina la tête avec hésitation puis se plia aux ordres, enjoignant ses sbires à se retirer à sa suite en maugréant. Les héros furent relâchés de leurs étreintes avec fureur et agressivité et certains embrassèrent même la terre à leurs pieds. L’individu vêtu de garance reprit un ton calme et apaisé : « Veuillez pardonner la rudesse de Gaâsz, j’espère qu’il ne vous a pas malmené… C’est quelqu’un de fier et de belliqueux, rustre et brutal mais qui nous sert très bien… et avec fidélité. » S’ensuit alors une discussion orale très fructueuse pour chacun des parties, entrecoupée par les quelques gestes muets et discrets que pouvaient s’échanger Dylinrae et cet homme mystérieux. Ils apprirent alors qu’il était membre d’un Clan de haute renommée et de grande importance politique au sein des Nations des Archipels Orientales, et qui avait deçà une place au Grand Conseil. Ils apprirent aussi, mais là, ce devint plus inquiétant, qu’il les connaissait déjà presque tous, de leurs faits et gestes, de leurs dires, de leurs possessions et de leurs vies et cela même en dehors des terres orientales… Vint enfin le moment tant attendu. L’homme, qui se révélait n’être qu’un intendant sur cette île ou un contre maître, comme il aimait se le décrire, leur proposa de passer un pacte peu rassurant. « Le fait que vous soyez en possession d’un bien qui nous soit si cher et familier, fera de vous des cibles faciles, que nos chasseurs ne tarderont à débusquer et à exécuter sans la moindre vergogne. Je vous offre l’opportunité d’éviter cette voie, car mon maître peut vous réserver un dessein différent de celui qui vous attend… si vous décidiez malencontreusement de repartir d’ici, après le meurtre d’un innocent tavernier, « traqués » par les vôtres, rejetés de vos ordres voire mis à mort par nos assassins. » L’aube était proche, et les héros se regroupèrent pour prendre la meilleure décision : la vie ou la mort. Sinaton, Dylinrae et Glingal acceptèrent sur-le-champ. Ses amis résonnèrent Aerdalis en lui faisant prendre conscience qu’il pourrait ainsi servir l’ordre et la justice, Gimble le suivait quelque fut son avis, désireux de mettre en chanson son épopée. Mais les négociations furent plus musclées face à l’opiniâtreté du nain. Cela força le contre maître à lui révéler d’une part, qu’il savait qu’ils étaient en possession d’un pavé de fer noir, et d’autre part, que son Clan connaissait le moyen de le forger (détail qui parut convaincre l’être bourru).
Le Pacte était scellé. L’intendant leur assigna une première tâche à accomplir afin de « prouver leur loyauté » envers le Clan : « Auriez-vous ouïe dire de la Terreur des chemins ? » Voyant la mine déconfite que lui détachèrent la plupart des héros, il continua. « Depuis fort longtemps déjà, un cavalier sillonne les routes de nos terres toutes les nuits, sauf quelques-unes. Il protège femmes et enfants des abus des gardes et des brigands mais il abat aussi tout autre homme sur son chemin, sans distinction d’âge, de caste ou de clan… Ce « justicier » sans nom interfère dans nos projets et passe à travers les mailles de nos filets, il est insaisissable. Votre mission est de faire en sorte qu’il ne puisse plus nuire à qui que se soit. »
De retour à l’auberge, il constate avec stupeur que celle-ci est comme neuve ! L’aubergiste les accueille avec énergie et bonheur, mais un détail le concernant les cloue sur place : son corps est tout couturé, comme rafistolé à la va-vite à l’aide d’un fil et d’une aiguille… Ils retrouvèrent leurs lits douillets et se rendormirent comme si de rien n’était.
Voilà, je crois que je ne peux pas faire mieux pour vous résumer toute la parie introductive de votre Campagne. J'espère ne rien avoir oublié de très important (d'avoir mis les détails les plus élémentaires) et ce après quelques 5 heures à la mettre par écrit. J'espère que ce récapitulatif t'aidera à connaitre le déroulé de la partie précédente Kats !
Bonne lecture !
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